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23/03/2024

Hommage à Jean-marie Straub et Danièle Huillet

L'AGICAM (Agir pour garder vivant le cinéma associatif à Metz),

avec les associations Ciné Art, Fragment et L’œil à l'écran, présentent :

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Jean-Marie Straub (Metz 1933 - Rolle 2022) a accompli avec sa compagne Danièle Huillet, décédée en 2006, puis aidé par sa seconde compagne Barbara Ulrich Straub, une des pages les plus importantes de l'histoire du cinéma. Réduisant les moyens cinématographiques à leur plus stricte nécessité, explorant plus tard les solutions offertes par l'outil numérique, Jean-Marie Straub est l'inventeur d'un nouveau cinéma : un cinéma où l'acteur - professionnel ou non professionnel - n'est pas une icône performante mais une présence, un corps, une voix ; un cinéma d'une temporalité et d'une matérialité rigoureuses, avec un sens inégalé du cadre, du montage et du son ; un cinéma respectueux du spectateur, de la liberté de son regard, de ses émotions, de sa pensée même.

Confrontant le cinéma à d'autres arts, peinture, musique, littérature, opéra, les Straub ont montré ce que seul le cinéma peut faire.

Il en résulte une œuvre célébrée dans le monde entier, œuvre magnifique d'une poésie intense, restituant autant les grandeurs de l'Art que les vibrations multiples de la Nature dans leurs cohérences et violences respectives.

Du 10 au 13 avril 2024, un hommage lui est rendu à Metz, sa ville natale : projections au cinéma Klub, conférence et projection au FRAC Lorraine, concert/projection à l'Arsenal, rencontre à la Médiathèque du Pontiffroy, rencontre à la librairie Autour du Monde.

Le programme complet à télécharger :

programme 1ère partie

programme 2nde partie

programme sur le site de l'AGICAM

12/09/2015

Une exposition sur la Grande Guerre

Lentement, (très) lentement se déploie le centenaire de la Grande Guerre. Quatre ans c'est long. Après un démarrage en fanfare, foisonnant de discours, spectacles, publications, l'actualité a repris son cours, chaotique, difficile à décrypter, amplifiée et mondialisée. Par intermittence, elle laisse apparaître que les conséquences de la première guerre mondiale produisirent les fondations de l'idée de l'Europe que nous tentons difficilement de poursuivre aujourd'hui.

Une nouvelle exposition se tient à Metz, Porte des Allemands, du 10 septembre au 11 octobre prochain (entrée libre du mardi au dimanche de 14h à 19h, renseignements 03 87 55 56 53):

A chacun sa Grande Guerre -Traces, destins, frontières)

Elle a ceci d'original qu'elle retrace les parcours parallèles de trois soldats qui ont combattu sous les uniformes français ou allemands (ou les deux successivement).

Félix Basin était un peintre-décorateur parisien, père de famille, mobilisé en 1914 à l'âge de 38 ans et envoyé avec un régiment de "territoriaux" dans la Marne, puis en Argonne, à Verdun, à Valmy...

Aimé Thiam était lui aussi un père de famille de 31 ans au moment où éclate le conflit. Mosellan, il intègre l'armée allemande. Il est envoyé à Forbach en tant que menuisier, puis, à la suite de son passage en conseil de guerre (il a ravitaillé des familles françaises), il doit  rejoindre la Macédoine où il finira la guerre.

Jean Thiriot, Mosellan lui aussi, est mobilisé à 18 ans en octobre 1915 sous l'uniforme allemand et envoyé sur le front russe. Il en déserte en mai 1916 et se constitue prisonnier auprès des Russes. Après plusieurs mois, il est enfin embarqué avec d'autres prisonniers alsaciens ou mosellan sur un bateau en direction de Brest. Il s'enrôle en France (Légion étrangère) et après son instruction est envoyé en Grèce (Salonique). Un peu avant la fin de la guerre, il rejoint les Ardennes.

Ces trois hommes ont laissé de leur guerre de nombreuses traces: dessins, croquis ou aquarelles (ils étaient tous trois artistes ou artisans d'art), correspondance (Félix basin a constitué un carnet de guerre), photographies nombreuses.

Le hasard des legs familiaux et des rencontres ont fait se rejoindre ces trois personnages et leurs fonds.

Faire cohabiter ces parcours si différents, c'est d'abord faire se rejoindre Français et Allemands (même malgré eux) dans un destin commun. Longtemps, et pour plusieurs générations, les Lorrains enrôlés de force dans l'armée allemande et les Malgré-nous (2nde guerre mondiale) ont été réduits au silence. Un sentiment de honte était courant dans les familles concernées (un soupçon de trahison ou de lâcheté, voire d'être profiteur de guerre).

L'exposition, par la mise en valeur des documents, montre d'abord l'humanité, la modestie, l'impuissance de ces soldats, qu'ils soient d'un côté ou de l'autre, face à des événements qui les dépassent. Leur attachement à leur famille, leur besoin de témoigner, leurs soucis quotidiens, leur confrontation avec des événements et des faits violents en font des personnages émouvants et finalement les rapprochent de nous en ce qu'ils partagent la même humanité.

Nous ressentons leur étonnement, leur douleur, leur colère ou leur résignation: ce ne sont pas des personnages de livre d'histoire, ce ne sont pas des personnages édifiants: ils deviennent pour nous des familiers.

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Enfin, il existe le blog de Félix Basin: http://leblogdefelixbasin.blogspirit.com/ :

Cent ans jour pour jour après les événements, donc entre août 2014 et janvier 2019 (janvier 1919: date de sa démobilisation), sont et seront publiés l'intégralité de ses carnets de guerre, de ses photographies et des ses dessins, selon le rythme réel de leur création.

 

14/04/2015

Où l'on voit que les habitants de Metz savent (enfin) parler anglais et qu'ils entrent dans le 21ème siècle

J'ai envie aujourd'hui de faire mon Delfeil de Ton (chroniqueur constant, pertinent et souvent féroce qui officie au Nouvel Obs depuis plusieurs décennies).

On est toujours le plouc de quelqu'un.

Je le suis, certainement, pour un nombre considérable de mes concitoyens. Cela ne me gêne pas dans la mesure où eux-mêmes le sont pour un nombre tout aussi grand. Ce n'est pas une raison pour ne pas gratter là où ça gêne lorsque, avec insistance, on nous balance des inepties, des projets ubuesques, le tout dans une sauce indigeste et, pour tout dire insincère. Je dis "on" car je ne veux dénoncer personne. Enfin si, il faut bien citer ses sources.

 J'en veux à ceux qui nous emmènent vers quelque chose pour moi d'indésirable et qui s'accompagne d'un verbiage pour moi insupportable. La langue ne ment pas, écrivait Viktor Klemperer (voir le beau film éponyme de Stan Neuman sur la transformation du langage en novlangue qui a accompagné la montée du nazisme en Allemagne). Rien de comparable pour nous aujourd'hui, bien sûr, mais soyons attentifs à quelques signes qui témoignent d'une autre novlangue, l'intrusion de vocabulaire anglais pour désigner ce qui va de l'avant, qui est énergique, qui fait jeune, en opposition à un vieux monde (qui n'est pas celui d'avant-guerre, mais bien celui des enfants de 68). C'est le langage du commerce, d'une certaine culture mondialisée. A cela près, toutefois, que ce n'est pas une langue, mais ce sont des bribes, des termes astucieusement distillés -pour faire une différence-, pour marquer (masquer?)  un territoire, en affranchissement des règles, sans passer par la case nécessaire d'un recul, d'une autocritique. Tête baissée vers l'avenir!

Et même, venant de lieux et de personnes auxquels on ne s'attendait pas.

Quelques citations:

"Showcases à Waves Actisud: Waves est un Open Sky Shopping Center" (programme du Festival  Passages 2015, page 28)

Cet échange entre le Maire de Metz et le Président de Metz-Métropole, rapporté dans le journal local du 14 avril 2015:

Le Maire: - Notre leitmotiv pourrait être back in the race car nous sommes revenus dans le peloton des villes qui innovent. (...) Les pleureuses, je les laisse à leurs pleurs, car personne ne nous attend. On n'a ni la mer, ni la montagne, on a donc intérêt à se bouger pour ne pas être relégué en division 2.

Le Président: - Yes we can!

Par ces mots j'en suis donc, des pleureuses, selon notre Maire.

Je pleure une ville que je voudrais autre, plus respectueuse de ses citoyens, plus harmonieuse dans ses choix. Je pleure d'être dans l'obscurité au moment où se décident les politiques économiques et culturelles de cette ville qui m'a vu naître (Là je ne fais décidément plus mon Delfeil!)

Je pleure ce qu'on me décrit comme une nécessité et qui est en réalité un choix.

 Comme je suis vraiment et décidément le plouc de quelqu'un d'admirable, je vais le citer par son nom et vous donner à lire un extrait tout aussi admirable, tant par ce qu'il dit que par la justesse de sa langue. Montaigne:

"  Nous allons en avant à vau-l'eau, mais de rebrousser vers nous notre course, c'est un mouvement pénible: la mer se brouille et s'empêche ainsi quand elle est repoussée à soi. "Regardez, dit chacun, les branles du ciel, regardez au public, à la querelle de celui-là, au pouls d'un tel, au testament de cet autre; somme, regardez toujours haut ou bas, ou à côté, ou devant, ou derrière vous." C'était un commandement paradoxe que nous faisait anciennement ce dieu à Delphes: " Regardez dans vous, reconnaissez-vous, tenez-vous à vous; votre esprit et votre volonté, qui se consomme ailleurs, ramenez-la en soi; vous vous écoulez, vous vous épandez; appilez-vous, soutenez-vous; on vous trahit, on vous dissipe, on vous dérobe à vous." (Essais 3, De la vanité)

21:20 Publié dans vu d'ici | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : metz, montaigne, novlangue