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19/12/2014

Etude de cas

La chaîne Kinepolis (que le public n'entend pas, pour l'instant, dans ce scandale qu'est l'attribution du monopole de distribution cinématographique pour la ville de Metz et sa région), commence à remuer un peu en achetant des encarts publicitaires dans le journal local .

Voyez cette vidéo publicitaire qui présente exactement les mêmes arguments que la publicité "papier":

Petite analyse de ce que représente le cinéma pour Kinepolis.

Un titre: Pour vous, nous réinventons le cinéma. C'est par une confusion linguistique qu'on attire le chaland: le cinéma, cela peut être la salle de cinéma comme cela peut être le cinéma lui-même, c'est-à-dire le film. Kinepolis ne peut pas réinventer le cinéma (qui se porte très bien sans lui), mais à la rigueur les conditions de confort de ses salles - et, passant, le pouvoir exorbitant de privilégier des films au détriment d'autres en exerçant un monopole-.

Des arguments:

Nous avons créé la place réservée au cinéma et nous avons fait disparaître les files d'attente. Soit, les caisses sont automatiques, il suffit de passer sa carte bleue, débitée aussitôt de 11€. Cependant, il aura fallu garer sa voiture (indispensable pour arriver jusque là), peut-être faire face aux embouteillages, au moins aux embarras de la circulation.

Nous cuisinons chaque jour un vrai pop-corn maison. Boum! Ça c'est imparable! Ce n'est pas encore bio, mais ça viendra. Mais pourquoi ne pas respecter ceux qui, comme moi, ne supportent pas un voisin qui mâche, fait des bruits de déglutition, s'abreuve goulûment. Comment un tel argument peut prétendre participer à une réinvention du cinéma?

Nous avons conçu des fauteuils plus grands, plus larges, plus confortables et équipés de doubles accoudoirs. Alors là je dis bravo! Ça justifie pleinement le prix de la séance. Mais remarquez, j'aurais pu rester chez moi devant mon écran plat 117cm et un film en vidéo à la demande. Seul, c'est quand même mieux pour des sensations encore plus fortes. Pourquoi continuer à aller au cinéma?

Nous avons doté nos salles de systèmes de son et d'image d'une qualité exceptionnelle. Voilà la réponse! Bien sûr, c'est indéniable, la qualité visuelle et sonore est là. Une qualité au service d'un certain cinéma, celui des blockbusters, des montages à un plan toutes les deux secondes, des explosions et de la violence visuelle et sonore, un cinéma, effectivement, encore plus fort en sensations. Cette surenchère, c'est également celle du déraisonnable développement commercial des périphéries, de ce massacre perpétuel des enseignes entre elles. Cette surenchère détruit plus qu'elle ne construit. Elle est opposée au sensible, à la nuance et à l'éducation. Elle est opposée à une culture du cinéma.

Là se pose un choix de société. Le monopole, a déclaré Jean-Marie Straub (qui fait du cinéma qu'on ne verra jamais à Kinepolis), c'est le début de la barbarie.

Si l'on accepte le monopole de la distribution cinématographique, c'est comme si l'on donnait à une seule chaîne de supermarché toute la distribution des biens de consommation, c'est comme si l'on n'avait qu'une seule librairie dans la ville, c'est comme si l'on n'avait qu'un seul parti politique.

C'est comme s'il n'y avait qu'un seul livre à lire, toujours le même.